L’IASB ouvre une réflexion sur la pertinence des notes annexes
L’IASB ouvre une réflexion sur la pertinence des notes annexes
Par Lionel Escaffre, professeur à l’Université d’Angers, commissaire aux comptes associé, groupe Y Paris
Cette difficulté normative (ED n° 2020/3) reflète une complexité et une difficulté à traduire dans l’information financière des éléments oubliés de la juste valeur comme les immatériels.
Le 25 mars 2021, l’IASB a publié un projet d’amendements aux normes IFRS 13 (Evaluation à la juste valeur) et IAS 19 (Avantages du personnel), texte destiné à améliorer l’utilité des informations financières pour les
lecteurs des états financiers. Le normalisateur a relevé depuis de nombreuses années que les rapports financiers comportaient une grande densité d’informations pas toujours pertinentes. Autrement dit, l’information est communiquée par mesure de conformité pour conforter une assurance dans le respect des normes comptables, sans forcément identifier les éléments véritablement nécessaires aux lecteurs des états financiers. L’objectif est de réduire la quantité d’informations conformes à la norme, sécurisantes pour les régulateurs de marché et de l’audit car répondant à un recensement exhaustif, mais en définitive peu explicites pour répondre aux parties prenantes. De nombreuses études académiques, aux Etats-Unis et en France, montrent que les parties prenantes, notamment les actionnaires privilégiées dans le cadre conceptuel IFRS, considèrent que la communication financière est traitée comme une « checklist » à valider sans appliquer un jugement professionnel suffisant et intentionnellement respectueux des attentes du marché.
Conformément au processus normatif, l’IASB souhaite solliciter les parties prenantes et plus particulièrement des investisseurs pour, d’une part, sélectionner les informations financières les plus pertinentes à retenir par les entreprises pour satisfaire leurs besoins, et d’autre part, recueillir les attentes des utilisateurs des états financiers en IFRS quant à la thématique de la juste valeur et des engagements de retraite. Ces thèmes font appel à des hypothèses d’estimations mathématiques dont la complexité peut parfois brouiller la clarté de l’information.
Dans le cadre de ce débat, les utilisateurs des états financiers IFRS ont souhaité une nouvelle approche pour l’élaboration des exigences en matière d’informations à fournir selon les normes IFRS. Cette approche serait destinée à guider les entreprises et les auditeurs pour qu’ils portent un jugement plus efficace sur la pertinence et la matérialité des informations à présenter et à contrôler. L’objectif n’est plus de contraindre les entreprises à assurer une présentation exhaustive et systématique des informations à communiquer dans les annexes mais à se concentrer sur celles qui sont réellement significatives pour les prises de décisions des parties prenantes. En conséquence, l’IASB propose que les notes annexes puissent répondre à une taxinomie en trois axes. Il serait demandé aux émetteurs de distinguer, (i) les informations générales dont la publication est impérative et systématique, (ii) les informations détaillées qui expliquent aux utilisateurs la manière d’interpréter ces informations et de les analyser, (iii) les informations spécifiques dont le contenu n’est pas standard et dépend des conditions économiques et du contexte comptable lié à l’exercice comptable en particulier.
Au-delà de cette typologie, ce débat est l’occasion de rappeler qu’une information financière pertinente est une information qui aidera les investisseurs dans leurs choix de gestion. Un investisseur est particulièrement sensible à la valeur de son investissement, conduisant le modèle comptable à rapprocher les valorisations comptables des valorisations de marché. Ce positionnement génère deux problématiques qui influencent la pertinence de l’information financière : d’une part la réflexion qui consiste à rechercher les éléments expliquant l’écart existant entre une valeur comptable et une valeur de marché, et d’autre part les interrogations suscitées par la pertinence de l’évaluation des transactions à la juste valeur. Or les informations contenues dans les états financiers ne peuvent plus expliquer, à elles seules, une quelconque relation directe liant la valeur comptable à la valeur de marché des actifs. En conséquence, les visées sociales et environnementales des entreprises associées aux poids des investissements immatériels (compétence humaine, organisation et réputation…) dans la performance sont des éléments qu’il serait peut-être nécessaire d’ajouter à cette taxinomie. L’insuffisance de la pertinence des notes annexes sur la juste valeur en particulier, et de même pour le calcul des engagements sociaux, est aussi une certaine représentation de la perte de pertinence du modèle comptable, perte expliquée par l’absence de reconnaissance des immatériels malgré leur part croissante dans les investissements des entreprises. La question de la place de la valeur des immatériels et des politiques de responsabilité sociale et environnementale dans l’information comptable relative à la juste valeur est clairement posée.
L’IASB sollicite les contributions des parties prenantes jusqu’au 21 octobre 2021.